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.La gravité de mon acte s’imposa soudain à moi : fuir de cette maison en emmenant Tsuyuko était un véritable abus de confiance.« Je suis plus méprisable qu’un voleur.Mais s’il l’avait fallu, j’aurais pu faire bien pire !— Je ne veux pas que tu dises des choses pareilles !— Mais même à l’avenir, je ne sais pas de quoi je suis capable !… »J’avais dit cela en guise de plaisanterie, mais en réalité je n’avais pas le cœur à rire.Sans doute mon visage s’était-il un peu durci.Tsuyuko eut un mouvement de recul : « Les voilà qui reviennent ! » On entendit le tintement d’une sonnerie, puis le bruit d’une canne sur les dalles de l’entrée, signalant le retour du vieux couple.« À demain alors ! » me dit-elle à voix basse, en restant un peu plus longtemps que d’habitude debout près de la porte.Nous ignorions encore que ces mots étaient le prélude à une longue séparation.Cette nuit-là , j’eus le plus grand mal à trouver le sommeil.La fuite du lendemain, l’incertitude de l’avenir, toutes ces pensées qui tournaient dans ma tête ne faisaient qu’accroître mon excitation.Si je ne dors pas, demain, je risque d’avoir de la fièvre.Plus je faisais des efforts pour m’assoupir, plus les yeux me brûlaient.Sous l’effet de l’autosuggestion, une sensation de chaleur gagnait peu à peu mon corps encore affaibli, et j’avais l’impression de flotter au-dessus de mon lit.Tant pis si je ne peux pas fermer l’œil ! Mieux vaut abandonner l’idée de dormir à tout prix.Comme je tentais ainsi de me calmer, le jour commença à poindre, et j’entendis bientôt un bruit du côté du réservoir, sans doute la vieille domestique, levée avant tout le monde, qui puisait de l’eau.J’avais renoncé à dormir.Je restai pourtant allongé, essayant au moins de me détendre, en attendant le moment convenu avec Tsuyuko pour notre fuite.Un peu avant huit heures, je me levai, m’assis sur une chaise.Tsuyuko, sortie par-derrière, devait à présent descendre à toutes jambes le sentier de montagne ; peut-être même était-elle déjà à l’arrêt de l’autocar, sa petite valise à la main, en train de m’attendre.À cette idée, je fus incapable de rester plus longtemps en place.Sans faire de bruit, je sortis des tiroirs de la commode des chaussettes et une chemise bien repassée, et commençai à m’habiller.Je n’étais pas aussi faible que je l’avais craint.Je jetai un coup d’œil par la fenêtre.Après m’être assuré qu’il n’y avait personne, je me chaussai dans le vestibule, et longeant la verrière, gagnai la véranda pour sortir dans le jardin.Mais alors que je passais soudain dans cette pièce illuminée de soleil, je fus pris d’un éblouissement, et faisant un faux pas, je m’affalai sur le sol de briques.À cet instant, revenant de ses courses, un panier à légumes à la main, la vieille servante entrait dans le jardin par la porte de derrière.Dans un vertige, je la vis se précipiter vers moi en criant.J’entendis vaguement : « Mais enfin, monsieur Saijô, qu’est-ce que vous faites là ? Vous n’allez tout de même pas sortir ? » Catastrophe ! Je suis découvert ! Je sentis une sueur froide dégouliner de mes aisselles, et je perdis connaissance.Quand je revins à moi, j’étais de nouveau allongé sur le lit, dans la même chambre.Le souvenir de ma fuite ratée remonta à la surface de mon esprit embrumé.Je suis ici, moi, mais qu’est-il advenu de Tsuyuko ? Je tendis l’oreille, essayant, d’après les bruits de la maison, de déterminer qui se trouvait dans quelle pièce, mais comme par un fait exprès, aucun son ne parvenait jusqu’à moi.Bientôt, j’entendis le grincement d’une porte qui s’ouvre, et vis apparaître la vieille servante, un sourire timide aux lèvres.« Vous êtes réveillé ?— Oui », lui répondis-je, puis je gardai le silence.Peut-être allait-elle me raconter quelque chose ? Peut-être Tsuyuko elle-même allait-elle se montrer ? Mais mon attente fut vaine.Par la suite, la vieille domestique vint souvent s’occuper de moi, mais elle semblait décidée à ne pas aborder le sujet qui me préoccupait.Tsuyuko, malgré mon espoir de la revoir, n’apparaissait pas.Quant au vieil homme qui, matin et soir, tout en jardinant, avait coutume auparavant de m’adresser quelques mots par la fenêtre, il ne se manifestait plus, même par un raclement de gorge.À la fin, n’en pouvant plus, je m’arrangeai pour faire parler la vieille domestique.« Mademoiselle est repartie à Tôkyô le jour même en compagnie de ses grands-parents.»Nous étions donc les seuls, moi, son mari et elle, à demeurer encore dans la villa.Repartie à Tôkyô le jour même ? Cela voulait-il dire qu’ils avaient tout découvert, et que Tsuyuko avait été de nouveau rendue à son père ? Sentant mes forces m’abandonner, je fermai les yeux
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