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.Comme je te l’ai dit, c’est une très vieille amie de la Famille.Et, oui, je l’ai revue avec assez de sang-froid.Elle ne change pas.Toujours aussi belle (j’ai du mal à penser qu’elle a dû avoir quarante-sept années en ellième dernière), toujours aussi lumineuse et toujours aimablement inaccessible.Mais cela ne me blesse plus comme autrefois.(« Autrefois » ! Trois années…)Chapitre 5Les réunions restreintes de la Famille se tenaient dans une des petites salles de la Bibliothèque donnant sur la cour centrale.Des gazoles allumées étaient accrochées au mur à la place des anciens chandeliers ; une lourde table occupait presque toute la place ; son bois ancien portait les traces de bien des réunions, sous forme de rayures, de figures plus ou moins géométriques et même d’initiales que personne n’avait jamais songé à éliminer.On disait à Béthély que la table avait été là au temps de la Ruche et qu’on pouvait y retrouver les initiales de la dernière Reine, Markali, gravées là alors qu’elle n’avait été qu’une petite princesse ignorante de son destin.C’était une table ronde, comme il convient entre égales, mais un siège au moins était différent des autres : une chaise à haut dossier, tapissée aux couleurs de Béthély.Selva y était déjà assise quand Lisbeï et Tula arrivèrent.Kélys était assise en face d’elle.Tula prit sa place habituelle à gauche de Selva – la place qui avait été celle de Lisbeï jusqu’à l’année précédente.Antoné choisissait toujours au hasard parmi la demi-douzaine de chaises qui restaient vides.Quand elle arriva, elle alla en prendre une à gauche de Tula, ignorant celle qui se trouvait à côté de Kélys.Mooreï arriva en dernier avec la liasse de feuillets, prit sa place à droite de Selva, jeta un coup d’œil autour de la table et poussa un soupir.Puis, d’une voix assourdie de fatigue, mais avec conviction, elle prononça les paroles rituelles : « Recueillons-nous en Elli.Qu’Elli nous guide en sa paix.»Selva mit fin au moment de recueillement requis avec le « Paix à toutes en Elli » où vibrait une légère note d’impatience.Puis elle ouvrit la séance sans plus tarder : « Vous êtes toutes plus ou moins au courant, mais je résume.Une découverte importante, peut-être grave, a été faite dans les souterrains de Béthély.En particulier, on a trouvé un carnet qui pourrait appartenir à une Compagne de Garde.Mooreï et Lisbeï se sont employées à en traduire des passages, Kélys y a jeté un coup d’œil.Nous sommes réunies pour prendre connaissance de leurs travaux et décider de la conduite à suivre.Mooreï ? »La Mémoire tapotait la base de la liasse de feuillets sur la table : « Nous avons traduit des passages un peu au hasard, pour avoir une idée approximative de l’ensemble, dit-elle enfin, les sourcils un peu froncés, sans regarder personne.Vous savez que le carnet n’est pas entièrement constitué de texte.Je vais vous faire part de ce que nous y avons trouvé et ensuite je vous passerai les copies des traductions qui ont été faites, essentiellement de la dernière partie.»Lisbeï chercha Tula des yeux, mais Tula, toute droite sur sa chaise, regardait Mooreï avec une expression grave et concentrée.Elles avaient passé la journée à tout recopier en six exemplaires et leurs doigts étaient encore couverts d’encre.Pas question de laisser qui que ce soit d’autre voir les traductions pour le moment, avait dit Selva.« Le carnet, ou le cahier, semble avoir été rédigé par trois personnes différentes, reprit la Mémoire, et d’après Kélys à au moins deux époques différentes.Une rédactrice pour la brève partie du début, impossible à dater, constituée uniquement de chiffres – sans doute un langage codé ; nous avons décidé de la laisser de côté pour le moment.Une autre rédactrice peut-être pour la partie médiane, en fait les deux tiers de ce qui reste, rédigée dans ce qui semble être une version très peu courante de vieux-frangleï.Et une troisième, qui dit s’appeler « Halde de Mélorney », n’a écrit qu’une douzaine de pages à la fin du carnet, en vieux-litali à peu près semblable à celui de la fin des Harems dans la région.»Mooreï jeta un rapide coup d’œil autour de la table et reprit : « Divers indices linguistiques, graphies, tournures de phrases, vocabulaire, font supposer des auteures et des époques différentes.Selon Kélys, la partie médiane daterait du milieu des Harems.L’échantillonnage est trop restreint de toute façon pour évaluer ces dates avec certitude.— Entendu », dit Selva.Au fait, disait l’expression de son visage qui n’avait pas changé depuis le début.Antoné s’était redressée mais semblait toujours plus butée que stupéfaite.Kélys s’était renversée sur sa chaise, une jambe passée sur un accoudoir, un coude sur l’autre et la joue en appui sur sa main, avec son habituelle souplesse nonchalante.Son visage noir, paisible, ne laissait rien transparaître.« Il semble y avoir dans cette partie médiane plusieurs versions de contes et de légendes connues, continua Mooreï, entre autres « La Reine qui dansait » et « La Géante aux cent bras ».Et ce qui semble être une amorce d’une version différente de la Parole.»Lisbeï essaya de réprimer son impatience ; c’était plutôt comme des essais différents des contes, avec des ratures, des reprises, des interpolations : pas des contes recopiés, des contes en train d’être écrits.Mais on y viendrait plus tard, sans doute.« Le vocabulaire de la dernière partie est restreint, les tournures peu recherchées.Ce qui appuie l’hypothèse d’une autre rédactrice.Elle résume la trahison de Garde par des Juddites de Béthély et la première mort de Garde, relate sa rencontre avec Garde ressuscitée près des Grandes Mauterres et les conversations qu’elles auraient eues pendant leur voyage de retour vers Béthély.»La voix de Mooreï était maintenant complètement dépourvue d’expression.« Voici les tentatives de traduction.Lisez-les vous-mêmes.»Lisbeï se leva avec empressement pour effectuer la distribution autour de la table.Quand elle fut revenue à sa place, elle jeta un coup d’œil à ses feuilles, par acquit de conscience ; elle savait exactement quels passages citer pour appuyer ses arguments, elle les avait encerclés en rouge le matin même.Elle regarda les autres en essayant de déchiffrer les nuances du silence.Tula relisait tout avec lenteur, très méthodique, comme si elle n’avait pas passé des heures à recopier ces lignes.Antoné parcourait le texte rapidement, revenant de temps en temps en arrière avec un sursaut, un froncement de sourcils.Selva laissait tomber les feuilles une à une sur la table avec parfois une sorte de soupir – exaspéré ou accablé, c’était difficile à dire.Kélys avait tout lu très vite et relisait maintenant chaque feuillet, le coude gauche appuyé sur la table, la joue dans la main, comme une écolière appliquée.Mooreï s’était appuyée au dossier de sa chaise, les yeux fermés.Elle semblait épuisée.Avec une perplexité mêlée de remords, un peu agacée quand même aussi, Lisbeï détailla un moment ses traits tirés, les cercles sombres sous ses paupières closes [ Pobierz całość w formacie PDF ]

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